L’UE se désolidarise du pouvoir sanguinaire d’Alpha Condé
Le Parlement européen a pris ce mercredi 12 février 2020 une résolution sur la Guinée et les relations entre ce pays d’Afrique de l’ouest et les pays de l’Europe. Voici le contenu de cette résolution de 17 points.
L’union européenne :
1. Est extrêmement inquiet par la situation de crise que traverse la Guinée Conakry ces dernier mois ; condamne la répression et toutes les violences et assassinats qui ont lieu dans le pays ; exprime sa solidarité avec les mobilisations populaires ;
2. Se déclare particulièrement préoccupé par les atteintes massives aux droits de l’Homme dans le pays concernant notamment les libertés d’expression, de manifestation, de réunion et l’intimidation des défenseurs des droits de l’Homme, journalistes, ONG, opposants au régime ; dénonce l’utilisation d’armes à balles réelles sur des manifestants ;
3. Exige le respect du droit à la liberté de manifestation, de réunion, d’association et d’expression garantis par les normes internationales et les traités et conventions des Nations Unies ratifiés par la Guinée Conakry ;
4. Accueille positivement la grâce accordées le 6 février 2020 à plus de 200 manifestants et demande la libération immédiate et sans condition de tous les prisonniers politiques, journalistes et défenseurs des droits de l’Homme emprisonnés depuis la mi-octobre ; se déclare particulièrement préoccupé par la situation dans les prisons ;
5. Demande au gouvernement guinéen à respecter strictement les principes des Nations unies sur le recours à la force et les armes à feu et à créer une équipe spéciale (ou unité) de juges pour enquêter sur la conduite des forces de sécurité et d’autres personnes impliquées dans des actes illégaux lors des manifestations ;
6. demande aux autorités de Guinée d’enquêter et de poursuivre, conformément aux normes internationales, les membres des forces de sécurité contre lesquels il existe des preuves de responsabilité pénale pour des exactions passées et actuelles ; souligne la nécessité d’ouverture immédiate du procès du massacre du stade en 2009, des viols et des autres exactions, et d’apporter tout le soutien politique, technique et financier nécessaire à un procès crédible pour ces crimes, et de mettre en congé administratif les personnes occupant des postes gouvernementaux qui ont été accusées de crimes graves, notamment du massacre du stade en septembre 2009, et qui sont en mesure d’influencer ou semblent influencer toute enquête ou poursuite criminelle ;
7. demande la tenue d’une enquête immédiate, indépendante et impartiale sur toutes les allégations de recours excessif à la force contre des manifestants, ainsi que sur les mauvais traitements et de surpopulation dans les prisons; insiste pour que les conclusions de cette enquête soient rendues publiques et les responsables soient déférés en justice devant un tribunal indépendant et impartial ; souligne que toute information présumée recueillie à la de mauvais traitements ne devrait jamais être admissible en tant que preuve dans une procédure judiciaire ;
8. Suggère une réforme des lois existantes en vue d’abroger toutes les dispositions accordant l’immunité judiciaire aux agents de l’État et garantissant des garanties telles que l’accès rapide et sans équivoque aux proches et aux avocats de toutes les personnes détenues ;
9. Invite les autorités guinéennes à adopter une législation détaillée requérant des sociétés minières et hydroélectriques qu’elles indemnisent équitablement les personnes et les communautés qui perdent des terres au profit de l’exploitation des ressources naturelles; souligne la nécessité d’améliorer et d’assurer effectivement l’accès des communautés touchées et des organisations de la société civile aux évaluations de l’impact environnemental et social, aux plans de gestion et aux autres données du Gouvernement et des entreprises concernant les droits de l’homme et les incidences sociales et environnementales de l’exploitation minière et des autres projets relatifs aux ressources naturelles ;
10. Demande en particulier à la Guinée Conakry de lancer une enquête indépendante sur les normes sociales et environnementales appliquées par les entreprises multinationales, en particulier dans le secteur des ressources naturelles et du port de Conakry ainsi que sur les liens que ces entreprises peuvent avoir avec la corruption, l’élection et le maintien au pouvoir de l’actuel président ;
11. Réaffirme la nécessité de garantir le droit de la Guinée Conakry à la souveraineté alimentaire, qui comprend le droit des paysans à produire les aliments permettant la nourriture de la population, en mettant fin à l’accaparement des terres et en assurant l’accès des agriculteurs à la terre, aux semences et à l’eau ;
12. Demande instamment à l’UE et à ses États Membres de suspendre tout financement et de fourniture de matériel de sécurité et de répression aux forces de sécurité de Guinée Conakry ;
13. Demande instamment aux États Membres de l’UE et en premier lieu à la France, de respecter le droit d’asile et les conventions internationales en la matière ; demande instamment à ce que l’aide au développement ne soit pas instrumentalisée pour limiter ou contrôler les frontières ou assurer la réadmission des migrants;
14. Invite l’Union européenne et ses États membres à accroître leur soutien financier ainsi que leur aide humanitaire afin de répondre aux besoins urgents de la population de Guinée Conakry et notamment des personnes déplacées; demande que l’aide de l’Union et des États membres soit fournie sous forme de subventions plutôt que sous forme de prêts afin de ne pas alourdir la charge de la dette; déplore que la majorité des États membres de l’Union n’aient pas atteint l’objectif consistant à consacrer 0,7 % de leur RNB à l’aide publique au développement et que certains aient même baissé leur pourcentage d’aide au développement ; déplore la non-participation de certains États membres aux programmes d’aide alimentaire;
15. Réaffirme que les activités des entreprises européennes présentes dans les pays tiers doivent pleinement respecter les normes internationales en matière de droits de l’Homme ; invite les États membres à veiller à ce que les entreprises qui relèvent de leur droit national restent tenues de respecter les droits de l’Homme ainsi que les normes sociales, sanitaires et environnementales qui leur sont imposées si elles établissent ou mènent leurs activités dans un pays tiers; appelle la Commission et les États membres à prendre les mesures qui s’imposent contre les entreprises européennes qui ne respectent pas ces normes ou qui n’indemnisent pas de manière satisfaisante les victimes de violations des droits de l’Homme relevant directement ou indirectement de leur responsabilité ;
16. Demande l’Union européenne à tenir compte de ses propres obligations en matière de démocratie et de droits humains dans les négociations pour le renouvellement de l’accord de Cotonou ; demande à l’UE et à ses États Membres de prendre en compte toutes les considérations de cet accord dans le cas spécifique de Guinée.
17. Charge son Président de transmettre la présente résolution au Conseil, à la Commission, au vice-président de la Commission et haut représentant de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, au président de la Guinée Conakry, au président du Parlement de Guinée Conakry et à l’Union africaine ainsi qu’à ses institutions.
Source : UE