Transition : Risques et dangers de la lenteur du CNRD

Alors que la déclaration, très claire et précise, de prise du pouvoir a été plutôt favorablement accueillie en Guinée et dans le monde, le nouvel homme fort de Conakry et son CNRD traînent dans des concertations politiques et sociales interminables dans un pays où la théorie et les discours ont toujours remplacé les actions, les actes, le pragmatisme et le réalisme. À ce jeu, le délai de grâce étant souvent limité, les dangers et risques d’un revers de la médaille planent à l’horizon.

Déjà, après un court round d’observation, la CEDEAO et les autres institutions internationales se mêlent de la partie et exigent notamment la libération du dictateur déchu, Alpha Condé, une transition de très courte durée (six mois), décident du gel des avoirs des membres de la junte considérés comme de simples putschistes.

Les anciens dignitaires jubilent et ne s’avouent pas encore vaincus

Le peu de militants naïfs, qui refusent également de faire le deuil d’Alpha Condé, croient de plus en plus au miracle et rêvent d’un rapide retour aux affaires du tyran déchu Alpha Condé.

Et pourtant, cette sévère réaction, mais de principe des institutions internationales, est injuste, aux antipodes de la volonté de l’opinion nationale et internationale, n’est pas une montagne incontournable. Le rêve obscur des nostalgiques de l’ancien régime ainsi que les menées sataniques de certains dignitaires, tenant coûte que coûte à retrouver les positions de privilèges brutalement perdues par l’acte historique et salvatrice du Colonel Mamadi Doumbouya, devraient être enterrés dès maintenant si le nouveau Président et le CNRD veulent réussir là où leurs aînés ont échoué, c’est à dire construire les soubassements d’un solide et véritable État.

Dans sa déclaration de prise du pouvoir, le Colonel Mamadi Doumbouya a su planter le décor et rassurer les uns et les autres quant à la nécessité de procéder à la rupture en Guinée en mettant fin à un règne de toutes les dérives inacceptables.

Si le dialogue et les discussions sont utiles, il faut éviter leur folklorisation en s’enlisant dans des discussions interminables parfois avec des plaisantins qui ont l’art de la parole pour ne rien construire.

Aujourd’hui, et nous l’avons dit et insisté qu’on ne peut pas faire des omelettes sans casser des œufs.

Le CNRD devrait tout faire pour ne pas paraître complaisant et ridicule en justifiant, par sa lenteur et ses hésitations, que l’ancien tyran Alpha Condé n’ait été sorti du palais que par goût du pouvoir d’un Colonel Mamadi Doumbouya qui semble détenir toutes les cartes en main.

Le CNRD et le nouveau Président de la République ne devraient pas continuer à parler et à agir comme si aucun motif valable ne justifie l’acte historique du 05 septembre 2021.

Loger Alpha Condé dans une suite présidentielle ; lui permettre de discuter avec des émissaires de la CEDEAO et de l’ONU alors qu’il est déjà destitué à cause de sa calamiteuse gouvernance,  de ses violations répétées de la loi ; laisser en liberté ses ministres et même permettre aux promoteurs du 3ème mandat et aux pyromanes de se recycler sous le manteau de leaders politiques, etc. sont des erreurs politiques que le CNRD devrait éviter.

Ceci n’est pas de nature à garantir le pouvoir du CNRD, à rassurer la communauté internationale quelque peu dubitative ainsi que les Guinéens qui fondent beaucoup d’espoirs sur ce nouveau départ.

Alpha doit connaître le sort qui lui est réservé. Il doit être entendu par un tribunal pour qu’il sache réellement de quoi on lui reproche. S’il a commis des crimes politiques et économiques, qu’on lui brandisse les faits et qu’il soit condamné à la hauteur de sa forfaiture.

La junte ne peut garder longtemps Alpha Condé en prison dorée, continuer à s’occuper et dénoncer des “actes subversifs” et prétendre diriger le pays paisiblement. La rupture, la fermeté et la rigueur dans la justice devraient être le fil conducteur.

A ce titre, l’ancien président, ses ministres, directeurs généraux qui se sont illustrés dans la mauvaise gouvernance, les violations de la loi, la gabegie financière, la corruption, le vol et détournement des deniers publics, le pillage des caisses de l’État, la campagne du troisième mandat, causant ainsi de nombreuses victimes parmi les jeunes manifestants, doivent passer devant un tribunal pour être entendus et jugés.

Toutes ces personnes doivent s’expliquer clairement sur les crimes politiques et économiques dont ils sont coupables et rapidement.

Comme l’a si bien dit le Colonel Doumbouya, à sa prise du pouvoir, “pas de chasse aux sorcières, pas de règlements de comptes  mais la justice doit être la boussole”  de toutes les violations, les gabegies, pillages des deniers publics, du népotisme, de l’instrumentalisation de l’administration publique, du piétinement des droits humains, de l’injustice caractérisée de la présidence Alpha Condé dont se sont rendus maîtres de nombreux ministres, secrétaires généraux, chefs de cabinets, directeurs généraux et nationaux, chefs de projets, DAAF du système Alpha Condé et mêmes quelques Hommes d’affaires.

Il faut donc mettre en œuvre et dès à présent ces mécanismes pour envoyer un signal fort à l’étranger en vue de barrer la route à toutes les spéculations et à toutes les velléités susceptibles d’entraver le programme du CNRD largement approuvé par les populations Guinéennes.

La junte militaire doit être ferme et catégorique sur le principe de la justice qui doit être le levier, plutôt le mot d’ordre dans le fonctionnement réel du nouveau pouvoir.

Elle doit également poser des actes réels, comme la composition du CNRD, la formation d’un gouvernement composé de cadres compétents, intègres non marqués politiquement, la mise en place d’une charte de la transition, les axes de la transition et sa durée.

Ces différentes mesures et décisions constitueront des preuves de rupture qu’attendent les Guinéens et permettront au pays d’avancer sur le bon chemin en posant les jalons et fondements d’un véritable futur État et d’une véritable démocratie.

Ibrahima Diallo

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