Les barbares sont de retour. Les sékou-touréens sont revenus avec leurs camps de concentration, leurs « cabines techniques », leurs cordes à pendre et leurs tonitruants discours tribalistes, les crocs encore plus longs, les griffes encore plus acérées qu’au début des années 70. Où étais-tu pendant ce temps, Guinéen ? Comme toujours, en train de dormir, convaincu, avec ta légendaire paresse d’esprit que Dieu veille sur tout et que les choses se feraient d’elles-mêmes.
La dictature, c’est comme la vermine, comme la mauvaise herbe, Guinéen : elle repousse aussitôt qu’on néglige d’aseptiser les mœurs politiques. « Le ventre est encore fécond d’où la bête immonde est sortie », disait Bertolt Brecht, à propos d’Hitler. A l’évidence, le ventre guinéen (faute d’avoir été assaini) est encore fécond pour enfanter des dizaines de nouveaux Sékou Touré et peu importe que ceux-ci soient revêtus de boubous ou de treillis.
Celui qui est là aujourd’hui ne compte ni réconcilier les Guinéens ni organiser des élections. Son seul et unique souci, c’est de réhabiliter le tyran (sans doute, l’individu le plus clivant de ce pays) et de régner ou de faire régner un rejeton du clan, 30 ans ou plus, par le feu et par le sang.
Après avoir le plus illégalement du monde donné à l’aéroport de Gbessia le nom du vampire qui a sucé le sang de 50 000 innocents derrière les murs du Camp Boiro, il a grassement subventionné un éditeur de la place afin de réimprimer les trente tomes qu’a laissés l’infatigable scribouillard du PDG. Il envisagerait aussi d’orner nos billets de banque de l’effroyable effigie du « Camarade Prési ».
Eh bien non, Lieutenant-Colonel Doumbouya, le budget de l’Etat guinéen est destiné à financer des ponts, des routes des écoles, des hôpitaux, pas pour publier les insanités littéraires d’un despote assoiffé de sang.
Que fait la CRIEF (Cour de Répression des Infractions Economiques et Financières) ?
Si l’on vivait sous un véritable Etat avec une véritable justice et de véritables juges, j’aurais porté plainte pour détournement de deniers publics, népotisme et apologie du crime. Mais pourquoi s’en prendre à cette pauvre CRIEF ? Nous sommes en Guinée où les tribunaux ne sont pas seulement incompétents pour telle ou telle affaire mais incompétents sur toute la ligne. Nos juges ne sont pas au service de la loi, ils sont là pour satisfaire les caprices du tyranneau du jour.
La Guinée n’appartient pas au peuple, elle appartient au chef. A cet égard, contrairement à ses prédécesseurs, le Lieutenant-Colonel Doumbouya n’a pas longtemps caché son jeu. Ce fut tout de suite les bruits de bottes et la justice à deux vitesses.
La Case de Bellevue pour André Touré, les domiciles de Cellou et de Sidya pour l’Etat, tout cela par simple décret, sans preuve, sans justificatif, sans aucun respect pour la procédure. Le comble est que ce sont des pickups bourrés de soldats encagoulés (comme le sont les auteurs de hold-up) qui ont déposé l’acte d’expulsion en lieu et place des commis de l’administration ! C’est le chef d’Etat -Major de l’armée et son adjoint en personnes qui sont venus procéder au déguerpissement.
Ah, ces armées d’opérette que sont les armées africaines ! Tout le monde sait que si les paras français ne s’étaient pas interposés au Mali, les Djihadistes auraient atteint les Îles de Loos sans rencontrer une seule poche de résistance.
Par Tierno Monénembo