Selon certains observateurs, l’on cherche à court-circuiter politiquement les deux grands partis par décapitation. Chronologiquement, l’UFDG d’abord, avec la récurrente affaire Air Guinée et la démolition de la maison de Dalein alors même que le contentieux domanial était pendant devant les juridictions, et maintenant le RPG, reparti à la reconquête du pouvoir à travers la désignation provisoire de Kassory à la tête du parti, dont certains caciques sont incarcérés depuis hier (y compris lui) et d’autres convoqués pour être certainement déférés à leur tour.
Si cette analyse est juste, alors il faudrait s’attendre à ce que le Colonel brigue la magistrature suprême, malgré ses engagements pris verbalement et malgré les verrous mis dans la Charte de la Transition, notamment la disposition qui interdit à tout acteur de la Transition de se présenter à une élection.Pour contourner cette disposition, il pourrait, par exemple, le moment venu, démissionner de la présidence de la Transition, prendre une disponibilité spéciale (ôter temporairement la tenue, comme Lansana Conté en 1993, 1998 et 2003) et se présenter à l’élection présidentielle sous la bannière d’une coalition de petits partis satellites.
Dans ce cas, son élection ne serait qu’une formalité, puisque c’est un ministre nommé par lui qui organiserait les élections et les gouverneurs, préfets et sous-préfets, tous présumés acquis à sa cause pour des raisons évidentes, joueraient leur rôle classique de fraudeurs aux élections dans leur zone de compétence.
Ce scénario serait quand même inquiétant. On n’est plus en 1993, les réseaux sociaux relayent tous les événements en temps réel et l’on ne peut pas impunément se mettre à dos trois régions naturelles (la BG, la MG et la HG) en même temps, dans un pays où la donne politique demeure ethnarchique (fort malheureusement)…
Hier lorsque le cortège emmenant en prison Kassory, Diané, Oyé et Zakaria passait au rond-point du port, les femmes avaient scandé des slogans et lancé des imprécations en Soussou contre on devine qui. C’est dire combien la déception et la frustration ont gagné toutes les couches sociales et toutes les composantes de la nation et combien toutes ces manœuvres aux relents politico-judiciaires semblent cousues de fil blanc…
Attention ! il ne faut pas pousser le bouchon trop loin. Force doit être à donnée à la loi, certes, mais pas en l’instrumentalisant. Du moins, l’opinion publique ne doit pas avoir cette fâcheuse impression.Sans compter que le président déchu n’a peut-être pas dit son dernier mot. Riche comme Crésus, vindicatif, batailleur et semeur de zizanie, il se balade en jet privé en Amérique Latine et sous d’autres latitudes et longitudes à on ne sais quel dessein.
par El B.